Ce soir, la salle est remplie. Les discussions sont feutrées, et la musique couvre confortablement le son des quelques éclats de rires de clients venus passer une jolie soirée avec leurs amis.

Mon nom est susurré dans le micro : c’est à mon tour de monter sur le podium, le temps de trois musiques.

Avec un sourire joueur, je me retire de la discussion dans laquelle j’étais engagée, et me dirige d’un pas ondulant vers le centre de la pièce, point de convergence des projecteurs. Les premières notes d’une nouvelle musique s’élèvent, et des picotements se font sentir dans mes mains et le long de mes cuisses. C’est le signe que la magie est en train d’opérer entre la musique et moi.

Je monte en douceur les trois marches du podium circulaire, dont le sol est comme recouvert d’un million de diamants, reflétant des éclats orangés de lumière sur mes talons hauts. Au milieu, se dresse une barre verticale, s’arrêtant juste sous un lustre, lui aussi constitué d’une pluie de diamants. J’attrape la barre en fermant les yeux, laissant ceux de la salle se poser sur mon corps.

Un calme absolu se répand en moi. Mes sens sont connectés plus que jamais à mon environnement. L’odeur du velours des sièges. La robe en soie caressant ma peau. La tiédeur de l’air, invitant à se découvrir. Et ces notes, ces notes de musique, qui me mettent presque en transe. Une énergie venant de mon bas-ventre se propage dans chacune de mes cellules, me faisant onduler. Les hanches d’abord, c’est de là que toute l’énergie commence à se transmuter en mouvement. L’onde se propage jusque dans ma poitrine, mes bras, puis ma tête, qui roule vers l’arrière, balayant mon dos nu de mes longs cheveux noirs.

Dans ce moment de grâce, mon corps exprime ce que mes mots n’auraient jamais su retranscrire. Donner mon corps en spectacle est à ce moment là une manière de prendre entièrement ma place face au monde.

Texte par : Emmanuelle